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Bail commercial – Juge des loyers – Première jurisprudentielle sur la notification du mémoire en réplique.

Bail commercial – Juge des loyers – Une première jurisprudentielle: A peine d’irrecevabilité, le mémoire en défense doit impérativement avoir été adressé par courrier recommandé et avoir été reçu, avant l’audience du juge des loyers.

Dans un arrêt du 15 novembre 2018 (RG n°17/03080) la Cour d’appel de Grenoble a fait droit à notre argumentation en ce sens, laquelle avait déjà été retenue par le Juge des loyers du Tribunal de grande instance de Vienne.

A notre connaissance, il s’agit de la première décision rendue à ce sujet. Une première donc, explications.

Au cas d’espèce, le locataire avait reçu la notification du mémoire en fixation du loyer commercial de la part de son bailleur et l’assignation devant le juge des loyers lui avait été régulièrement délivrée.

Seulement celui-ci avait tardé jusqu’à la veille de l’audience pour adresser son mémoire en réplique au bailleur, par courrier LRAR, comme le lui impose la loi.

Le lendemain et à l’appel des dossiers devant le Juge des loyers, le conseil du locataire indiquait avoir adressé le mémoire par courrier recommandé.

Seulement, s’il était en mesure de justifier de l’accusé d’envoi, il n’était pas en mesure de produire l’accusé de réception de son mémoire par le bailleur et pour cause : ce dernier était toujours en cours d’acheminement.

En pratique, qu’aurait du faire l’adversaire ? Faire notifier son mémoire par voie d’huissier et en urgence afin qu’il puisse être reçu la veille. Sans doute une telle formalité l’aurait couvert.

Mais faute de l’avoir fait, le bailleur a sollicité et obtenu le rejet du mémoire adverse, non notifié dans les règles, ainsi qu’il le sera expliqué ci-dessous.

Ce qui lui a permis d’obtenir le déplafonnement et la multiplication par deux du montant de son loyer commercial, le magistrat estimant, sur la base du rapport d’expertise amiable transmis, que sa demande et le montant proposé étaient suffisamment étayés et justifiés.

Résultat, un loyer commercial annuel passé de 26 880 euros HT à 62 000 euros HT.

Juridiquement, quels étaient les arguments du bailleur?

La procédure applicable au Juge des loyers commerciaux est une procédure très spécifique qui se caractérise par des échanges de mémoires (et non des conclusions) lesquels doivent intervenir avant la première audience.

Cet échange de mémoires est encadré par des règles strictes, souvent qualifiées d’ordre public par les juridictions, bien que cela ne soit pas clairement indiqué dans les textes.

S’agissant de la forme de l’envoi, l’article R.145-26 du Code de commerce dispose que “les mémoires sont notifiés par chacune des parties à l’autre, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception. La notification est valablement faite par le locataire au gérant de l’immeuble”

La Cour de cassation considère que la formalité de la notification du mémoire est remplie dès lors que le destinataire a été à même de retirer le courrier recommandé. (Cass. 3ème civ., 16 oct. 2013, n°12-20103; Cass. 3ème civ., 6 nov. 1986, n°84-10103)

Selon nous, cette jurisprudence trouve notamment son fondement dans les dispositions de l’article 668 du Code de procédure civile qui dispose que “la date de la notification par voie postale (…) est à l’égard de celui à qui elle est faite, la date de la réception de la lettre“.

S’agissant des destinataires des mémoires, même si, en pratique, ceux-ci sont rédigés par les conseils du bailleur et du locataire, cette notification doit être faite impérativement par les parties elles-mêmes, entre elles, et non par les conseils, entre eux. (Cass. 3ème civ., 16 oct. 2013, n°12-19352)

La partie qui n’a pas adressé son mémoire avant l’audience ne peut – c’est du moins ce que nous soutenions – développer ses arguments lors des plaidoiries.

En effet, sous réserve que cette notification des mémoires ait été faite dans le respect des dispositions susvisées, l’article R.145-29 du Code de commerce dispose que les parties “ne peuvent, ainsi que leur conseil, développer oralement, à l’audience, que les moyens et conclusions de leurs mémoires” (dès lors qu’ils sont réguliers et recevables donc).

L’article 792 du Code de procédure civile, applicable par renvoi de l’article R.145-28 du Code de commerce dispose également que “si le défendeur a constitué avocat, l’affaire est plaidée sur-le-champ en l’état où elle se trouve, même en l’absence de conclusions du défendeur ou sur simples conclusions verbales“.

En clair: si le mémoire ne répond pas aux exigences de formes, ou qu’il n’a pas été notifié régulièrement et préalablement à l’audience, il ne peut être considéré comme valide, de sorte que faute de mémoire, la partie ne peut pas développer d’arguments.

Comme le rappel un ouvrage de référence, le défendeur “ne [peut] être entendu que s’il a présenté un mémoire écrit avant la date d’audience” et que s’il a adressé ce mémoire à l’autre partie par courrier recommandé (Droit et pratique des baux commerciaux, Dalloz, 4ème éd., 2015, n°370.1120, p.428 et 432 : “moment de l’échange des mémoires”)

Seulement, à notre connaissance, cette affirmation ne trouvait son fondement dans aucune jurisprudence.

C’est chose faite à présent.

En pratique, qu’a t’il était fait?

Tout d’abord, nous nous sommes opposés au renvoi et avons demandé à ce que l’affaire soit immédiatement plaidéen ce afin d’éviter la régularisation ultérieure de la procédure par la réception du mémoire.

Sur ce point, la procédure devant le juge des loyers étant une procédure à jour fixe elle doit être plaidée « sur le champ » (article 792 du Code de procédure civile).

Ensuite, nous avons fait noter au plumitif que le mémoire avait été déposé “au greffe à 16h13, soit après l’appel du dossier” et que le locataire n’était pas en mesure de justifier de l’accusé de réception de son mémoire par le bailleur (afin que la preuve de la réception tardive du mémoire ne puisse être contestée lors de la procédure d’appel).

Après avoir vérifié la régularité du mémoire et de la procédure, le temps dont disposait la partie adverse pour y répondre, le juge a vérifié si le mémoire en défense avait ou non été effectivement reçu par le demandeur, c’est à dire, si le défendeur était en mesure de justifier d’un accusé de réception.

La formalité de l’accusé de réception n’ayant pas été pas remplie, le Juge en a déduit que le mémoire produit n’avait pas été notifiée au bailleur avant l’audience, de sorte qu’il était irrecevable.

Il semblerait néanmoins possible de remédier à cette carence via l’appel.

C’est du moins ce qu’a jugé la Cour d’appel de Grenoble statuant sur la décision du Juge des loyers en relevant que: “Pour autant, la notification du mémoire en défense avant que la cour ne statue est de nature à régulariser la procédure et rend recevables les prétentions du preneur reprises et exposées dans ses conclusions écrites

Cela nous semble contestable (et sur ce point l’article serait à compléter) mais nous n’irons pas argumenter à ce stade puisque nonobstant cette affirmation, la Cour a maintenu la décision du Juge des loyers faisant droit à notre demande de déplafonnement. Ce qui nous va très bien.

En effet, résultat: une valeur locative déplafonnée de 26 880 euros HT à 62 000 euros HT.

A ce prix là, mieux vaut notifier son mémoire dans les délais.